4 juillet 2017

exorcisme

Central Park, par Pierre Alechinsky, 1965 


« Argument. Certains disent, puisque le monde extérieur existe, qu’il faut le nier ; d’autres, puisqu’il n’existe pas, qu’il faut l’inventer ; d’autres encore, que seul existe le modèle intérieur. Pierre Alechinsky hoche la tête et, sans rien dire, peint un rectangle dans lequel il enferme le Central Park de New York, vue de sa fenêtre, à la tombée du jour, les yeux fermés. Le rectangle cerne le parc ; il est divisé en espaces irréguliers, tous de forme rectangulaire eux aussi, comme les loges d’un théâtre, les cellules d’un couvent, les cages d’un zoo. A l’intérieur, dans chaque loge, grouillent des êtres bizarres qui, toutefois, semblent vaguement familiers : qui sont-ils, eux ou nous autres, nous voient-ils ou les voyons-nous ? Au-dedans du rectangle, Central Park s’est converti en un Cobra vert, noir et doré. Est-ce une anamorphose d’Alice, dame de diamants dans notre jeux de cartes somnambule ? La peinture n’est pas vision mais exorcisme. » 



Octavio Paz